J'avais rêvé d'un autre monde pour nos descendants...
Il me semble que j'ai été une mère soucieuse de laisser s'épanouir le
potentiel de son enfant, que je suis encore une grand-mère aimante, curieuse
de la vie sous toutes ses formes, engagée dans la société avec les moyens
intellectuels et affectifs qui m'ont été donnés à la naissance.
Toutefois, quand je regarde aujourd'hui ce que vit la jeunesse européenne,
pourtant plus favorisée que beaucoup d'autres à travers le monde, je sens
mon cœur se serrer. Certains en vont même par désespoir à se suicider. Dans
les médias, on les présente parfois comme des inconscients immatures,
uniquement préoccupés d'écran, de jeux en ligne ou de réseaux sociaux.
Seraient-ils devenus égoïstes, blasés, découragés ou paresseux?
Je ne le pense pas. Ne chercheraient-ils pas plutôt leur véritable place dans la
société que nous allons laisser derrière nous?
A leur âge, nous aussi nous avions envie de sortir, de voir des amis, d'aller
danser et c'était considéré comme normal. La sacro-sainte valeur travail
n'empêchait pas les rêves d'avenir. Aujourd'hui, dans ce monde en pleine
mutation, allons nous les cantonner dans nos esprits à un horizon bouché par
le spectre du chômage, de la précarité, par le risque d'être contaminés ou,
bien pire, contaminants pour leurs proches? Quel message positif, nous les
adultes, pouvons nous encore leur transmettre?
Certes, nous n'avons pas réussi jusqu'ici à nous sortir des pièges de la
société de consommation, d'un capitalisme financier débridé et d'une
agriculture polluante qui montre ses limites, tout comme d'un mondialisme
basé sur le profit immédiat, où les GAFAM règnent en maîtres. Au-delà du
complotisme, je m'appuie sur le constat que les lanceurs d'alerte sont
pourchassés, les journalistes d'investigation muselés, les professeurs de
médecine intègres passant pour des charlatans face à d'autres qui «tirent les
ficelles», en étant prisonniers conscients ou inconscients des lobbies et de
conflits d'intérêt.
Le flambeau à transmettre à nos jeunes ne serait-il pas de les encourager à
oser aller de l'avant, à briser enfin les chaînes des rôles basés sur le pouvoir,
l'apparence, à éradiquer le sexisme, le racisme, les inégalités sociales tout
comme le patriarcat? Il me semble que les possessions, la sécurité ne sont
plus tout à fait leur priorité et c'est encourageant. Je pense qu'ils ne sont pas
tous résignés ou inactifs. Et ne pouvons nous imaginer qu'ils se préparent à
nous remplacer afin de briser des tabous, de choisir leur avenir pour, un jour
peut-être, pouvoir reconstruire une société nouvelle où la passion, la
créativité, la solidarité réenchanteront le monde?
La plupart des jeunes, en effet, respectent les animaux, apprécient la
nature, ont envie de se nourrir sainement. Ils sont soucieux de la pollution
des océans, du réchauffement climatique et de la déforestation. Certains
créent déjà des start-up où ils testent leur créativité, d'autres militent en
s'appuyant sur des associations engagées. Un certain style d'enseignement
même cherche à les préparer à être de futurs parents, de futurs
consommateurs pleinement responsables de leur impact sur notre planète.
Notre état d'esprit à l'égard de la jeunesse ne pourrait-il pas être
résolument positif, en les incitant à choisir leur vie plutôt que de la subir?
Grâce à Internet, ils sont au courant de tout, bien plus que nous ne l'étions.
Encourageons les à vivre leurs rêves sans fuir dans le tout virtuel, à poser
les bases d'une autre société plus juste correspondant à des valeurs de
partage et de fraternité mondiale. Car, il y aura place pour des initiatives,
des innovations. Devenir pionnier, imaginatif en vue de la création d'un
monde nouveau, ne serait-ce pas exaltant pour notre jeunesse?
La peur de l'avenir qui règne actuellement me paraît être un virus au moins
aussi dangereux que la Covid 19. En lieu et place d'une culpabilité de n'avoir
pu faire davantage, donnons leur l'exemple de l'optimisme, du courage, de la
foi en la vie. Nous sommes conscients que ce temps de crise est là pour nous
aider à rompre avec l'Ancien Monde, en remplaçant le mythe du progrès par
la joie de vivre le moment présent. Car nous sommes confiants que des
forces invisibles veillent sur nous. Leurs voyages à travers la planète
deviendront peut-être des voyages intérieurs, les incitant à tester le monde
mystérieux des énergies, de la méditation, afin d'aligner leur tête, leur cœur
et leur corps...
Le 21 ème siècle pourrait alors retrouver des valeurs humaines et
spirituelles, susceptibles de guider la vie de nos descendants, en remplaçant
peu à peu «l'avoir par l'être». Dans cette espérance...
Lyliane