17/12/2018
Récupération de vêtements usagés pour en faire des matériaux de construction...
Des chercheurs australiens ont développé un procédé qui permet de transformer des vêtements usagés en matériaux de construction. Une technique de recyclage novatrice qui pourrait contribuer à réduire le gaspillage et la pollution générés par le textile.
La mode, un phénomène éphémère par essence. Aussitôt portés, les vêtements subissent, non pas l’usure du temps, mais celui du "fast-fashion"… En l’espace de quelques mois, les habits se transforment aux yeux de certains en loques bonnes à jeter. Rien qu'aux États-Unis, ce sont ainsi 10 millions de tonnes de vêtements qui terminent chaque années au fond des décharges. Un incroyable gaspillage qui libère en outre des gaz à effet de serre, ainsi que de nombreux polluants. Face à ce constat, des chercheurs australiens détiennent peut-être la solution : transformer ces masses colossales de vêtements usagés en matériaux de construction. Une idée novatrice présentée au fil d’une publication parue il y a peu dans le Journal of Cleaner Production.
Un non-sens environnemental
"Non seulement [le gaspillage de textile] est mauvais pour l’environnement, mais cela empêche également de saisir l’opportunité de transformer de précieuses fibres textiles en un nouveau produit", déplore l’une des scientifiques à l’origine du projet, Veena Sahajwalla, de l’Université de Nouvelle-Galles du Sud, en Australie.
La chercheuse et son équipe ont donc entrepris de récupérer dans des bennes de tri une série de vêtements hétéroclites. Après les avoir débarrassés, à la main, de leurs accessoires - boutons, fermetures, et autres boucles de ceintures -, les scientifiques australiens ont finement broyé leur récolte de coton, de nylon et de polyester, grâce à une déchiqueteuse spécialement adaptée à ce type de matière.Une fois cette matière première obtenue, les chercheurs y ont ajouté un liant, puis l’ont compressée et chauffée pendant trois quarts d’heure à près de 185°C, et ce afin de former des panneaux denses et résistants. Une gageure alors que la nature des textiles mélangés s’avère extrêmement variable. "Il est possible que l’on doive ajouter au mélange un peu plus de l’un des composants, afin d’ajuster les propriétés [du produit fini]", concède Veena Sahajwalla.
Toujours est-il que le résultat de l’expérimentation s’est révélé pour le moins concluant. Soumis à une série de tests de qualité, les panneaux produits ont démontré une résistance mécanique à l’eau et au feu absolument remarquables. De quoi en faire un matériau de construction idéal pour les sols, ou encore les murs des bâtiments.
Des matériaux qualitatifs à tous points de vue
Leur aspect, lui-aussi, s’avère particulièrement flatteur : ressemblant tantôt à du bois, tantôt à de la pierre, ou même à de la céramique, en fonction de la composition du mélange textile de départ. Si le procédé est pour l'instant, limité à une installation expérimentale établie dans les sous-sol de l’Université australienne, les chercheurs ne comptent pas en rester là.
Veena Sahajwalla et ses collègues travaillent d'ors et déjà à concevoir une petite usine afin de voir si leur invention peut être transposée à plus grande échelle. De quoi lancer prochainement sa commercialisation, comme ils l’espèrent. Une première dans le monde pour un matériau de construction solide. Toutefois, cette équipe n'est pas la première à vouloir trouver une seconde vie aux vêtements usagés.
D'autres initiatives sont actuellement développées dans le but de transformer cette même matière en isolant thermique et acoustique. Une voie empruntée notamment en France par la Scop Le Relais, issue du mouvement Emmaüs. La preuve que, finalement, le "fast-fashion" n’a peut-être pas que des mauvais côtés !
Benoît Crépin - Gentside - vendredi 14 décembre 2018
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