Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

01/01/2020

Association Epices:cuisiner pour créer du lien...

Isabelle Haeberlin était enseignante dans un quartier sensible avant de fonder l’association Épices, où l’on cuisine pour recréer des liens. Le 30 novembre 2019 à Kingersheim, elle a participé au débat sur le thème «La culture pour renouer avec la solidarité?»
Et si la cuisine ouvrait l’esprit? Isabelle Heaberlin, présidente de l’association «Epices», créée à Mulhouse (Haut-Rhin)en 2009 y croit. Cette ex-enseignante en ZEP (Zone d’éducation prioritaire, aujourd’hui REP+) a l’habitude de traiter avec des publics difficiles. Sa voix est cristalline et bienveillante. Un projet qui a mis cinq ans à germer. Épices, «Espaces de projets d’insertion cuisine et santé» est un nom aux sonorités gourmandes, pour une association qui propose de «recréer des transmissions» grâce à la cuisine, l’éducation au goût.

Concrètement, le projet est d’abord né d’une envie de réunir parents et enfants autour d’ateliers de cuisine. «Au début, on accueillait surtout des mamans des quartiers, raconte Isabelle Haeberlin. Ça nous permettait de les accompagner et qu’elles ne restent pas seules chez elles.» Plutôt que des cours, la Mulhousienne préfère dire qu’elle propose des ateliers : «Dans ce mot, il y a l’idée de lier, explique-t-elle. D’ailleurs, les mamans des quartiers savent souvent très bien cuisiner. Elles savent comment faire, les yeux fermés, au simple toucher.»

Peu à peu, le concept se développe, jusqu’à proposer des formations pour des publics en réinsertion ou des décrocheurs scolaires. L’association se déplace aussi dans les collèges de Colmar et Mulhouse. «Il y a quelques années, nous avons reçu un jeune réfugié tibétain. En quelques mois, il a réussi à intégrer un CAP cuisine, se souvient Isabelle Heaberlin. Aujourd’hui, il travaille dans un restaurant étoilé à Strasbourg.» Des exemples de réussite comme celui-ci, l’enseignante en a beaucoup à raconter : «L’année dernière, on nous a envoyé un jeune incarcéré. Maintenant, il travaille chez Thierry Marx à Paris.» Sur onze jeunes en formation avec le Greta (un réseau de formation) l’an passé, sept ont trouvé un emploi.

Isabelle Heaberlin l’admet, s’occuper de publics sensibles n’est pas toujours simple. «C’est un travail sur le temps long. Il faut accepter que leur parcours ne soit pas rectiligne.» Lors des ateliers, mamans et ados cuisinent parfois ensemble. «C’est important, ce dialogue entre les générations, souligne la présidente d’Epices. Avec les mamans, ils apprennent mieux. Ils osent moins transgresser les règles.»

Malgré les difficultés, Isabelle Heaberlin ne perd pas espoir. «En ZEP, les personnes sont écrasées par leur quotidien. Mais il y a vraiment un potentiel énorme.» Et elle l’affirme : jamais elle ne baissera les bras : «C’est grâce à eux que je trouve la force de faire ça tous les jours.»

D'après Mme Sarah Chopin - Libération - samedi 30 novembre 2019