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08/04/2021

Prise de conscience sanitaire pour la France...

Les lits de réanimation se sont imposés durant la pandémie comme l'alpha et l'oméga: leur taux d'occupation détermine surchauffe du système hospitalier, la vie économie et sociale et jusqu'aux libertés publiques. On a beaucoup glosé sur le retard de la France, qui selon l'OCDE n'aurait que 16,3 lits de soins critiques pour 100 000 habitants, contre 33,9 pour l'Allemagne. Une critique balayée par la Cour des comptes dans son rapport d'activité pour qui «les différences des deux modèles rendent les comparaisons difficiles», ces chiffres ne comptabilisant pas les mêmes choses. En réalité, la France comptait au 31 décembre 2019, avant que n'éclate la pandémie, 5 433 lits de «réa», auxquels il faut ajouter 8 192 lits de surveillance continue et 5 955 lits de soins intensifs. Soit au total 19 580 lits de soins critiques, rassemblant près de 54 000 équivalents temps plein de personnels médicaux et paramédicaux. Ces lits représentant une dépense de près de 7,2 milliards d'euros (contre 6,6 milliards en 2014), dont 3,3 milliards consacrés à la réanimation pure. Pour autant, la Cour formule deux critiques. Tout d'abord, pour faire face à l'afflux brutal de patients au cœur de la crise, les services se sont réorganisés en transformant des lits hospitaliers - suffisamment équipés en matériels et fluides médicaux - en lits de réanimation dits « éphémères ». Cette mobilisation a permis de passer rapidement de 5 080 lits installés au 1er janvier à 10.502 lits le 8 avril, et 10 707 lits le 15 avril. Mais cette reconfiguration s'est faite au prix de déprogrammations massives, entraînant une perte de chances pour les malades non-covid dont l'impact «aujourd'hui inconnu et potentiellement considérable» devra être mesuré, estime la Cour.

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D'autre part, le privé a été trop tardivement associé à la réponse sanitaire, observe la Cour. Les patients hospitalisés dans le public sont passés de 80% début avril à 67% à la fin du mois. En parallèle, le secteur privé non lucratif a vu sa part passer de 10% à 19% et le secteur privé lucratif de 9% à 14%. La coordination public-privé a mis du temps à se mettre en place conduisant parfois des patients à être accueillis en mode dégradé dans des hôpitaux publics surchargés, ou transférés, alors que des places étaient disponibles en cliniques et hôpitaux privés. À l'avenir, il faudra bâtir «un modèle d'organisation et de coordination des soins critiques et son mode de gouvernance, qui soit en mesure d'inclure les structures publiques et privées» recommande la Cour.
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Face à ce constat, les sages de la rue Cambon identifient trois priorités  Tout d'abord, il faudra à l'avenir dans le futur mieux tenir compte des besoins. Les syndicats de la fonction publique ont beaucoup fustigé les fermetures de lits intervenues dans le passé, censés être responsables de l'engorgement durant la pandémie. Or, s'il est vrai que des lits d'hospitalisation ont été fermés (-5,6% entre 2013 et 2019) pour tenir compte du développement de l'ambulatoire, les lits de soins critiques se sont en revanche accrus de 7% sur la même période. Cette croissance a surtout profité aux lits de surveillance continue. Pour la réanimation, «la progression de 0,17 % par an s'avère dix fois plus faible que celle des effectifs de personnes âgées (+ 1,7 % par an), qui constituent pourtant près des deux tiers des malades hospitalisés dans ce secteur», regrette la Cour. De fait, le taux d'équipement en lits de réanimation n'était plus que de 37 pour 100 000 habitants de plus de 65 ans à la veille de la crise sanitaire, alors qu'il était de 44 pour 100.000 habitants en 2013. La Cour prône donc «d'évaluer l'impact du vieillissement de la population sur les besoins d'hospitalisation en soins critiques à long terme et d'augmenter l'offre en conséquence».
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La deuxième priorité sera de réduire les tensions sur les ressources humaines, dont on a constaté qu'elles étaient le principal goulot d'étranglement. Parce que le travail en réanimation est fatigant et psychologiquement lourd - un patient sur cinq admis en «réa» décède au cours du séjour -, les infirmières cherchent rapidement à changer de service. «Un important turn-over d'infirmiers traduit la difficulté à fidéliser ces personnels et conduit ponctuellement à la fermeture de lits», souligne la Cour. Et ce, d'autant que les 28 000 infirmières exerçant en soins critiques sont à 95% non spécialisées. Les magistrats recommandent donc de revoir la formation initiale des infirmiers et surtout de mettre en place une formation qualifiante et reconnue d'infirmier en réanimation. En outre, la Cour recommande aussi de renforcer les effectifs de médecins, à la fois médecins anesthésistes-réanimateurs (MAR) et médecins intensivistes-réanimateurs (MIR).
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Enfin, troisième piste d'action, il faudra «déterminer un nouveau modèle de financement des soins critiques», recommande la Cour. En effet, avec le système de tarification actuelle, les hôpitaux ne sont pas incités à ouvrir de nouveaux lits, car chacun génère actuellement un déficit moyen estimé par la Cour à 115 000 € par an. Et ce, sachant qu'un séjour en réanimation représente une charge moyenne de 1 848 € par jour d'hospitalisation en 2018.

Selon www.lefigaro.fr - Le Figaro - jeudi 18 mars 2021

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